D’habitude, Avril est un mois plutôt pourri dans nos montagnes des Catskills, au Nord de New York. Neige, vent c’est le lot. Sauf que ce week-end là, ça sentait le Printemps à plein nez et le Marc T. avait rudement bien choisi son jour pour venir de la ville pêcher les fameuses rivières de la contrée. Pas le temps de défaire les sangles de sa valises que le Marc avait déja enfilé ses waders et sa magnifique veste Barbour. L’était beau comme un prince, l’élégance Suisse, ça ne se copie pas ! La riviére est en parfait ordre après son dernier virage avant le Pepacton reservoir. riverpepacton-sign1Une eau de rêve ” Vitteloise, l’eau qui chante et qui danse “. Un peu tôt dans la journée pour les éclosions des fameuses “Hendrickson” les premières de la saison, celles qui rendent les truites folledingues. Alors, afin de calmer nos impatiences, nous nous installons, adossées à ce gros tronc d’arbre allongé au bord de l’eau, débouchons une bouteille de cet affreux vin de Long Island et, comme tous les pêcheurs de monde commençons à sortir des conneries, les plus grosses les meilleures. Le soleil se fait  de la partie, alourdissant la conversation, les mots se raréfient et , doucement, nous commençons à sombrer dans une délicieuse somnolence. Le rappel à l’ordre fut sans appel. Imaginez vous être réveillé par le bruit  des truites se jetant avec rage et abandon sur  ces pauvres insectes dérivant paisiblement sur l’eau. Je sais; ça parait être une belle blague Marseillaise et pourtant ça s’est passé comme ça ! Et le Marc se trouve en 2 secondes attelé à un magnifique poisson, une grosse mémère qui veut absolument retourner au reservoir. Magnifiques cabrioles. Putain, ma mouche vient d’être engloutie à son tour et ça tire sec!! Et c’est comme ça, non-stop pendant les deux heures qui suivent. De l’autre coté de la rivière, assis sur un strapontin, se trouve un autre pêcheur. Un  “local” comme on dit, à voir sa mise de paysan et celle de son jeune fils assis à ses coté. Le gars pêche au vers ces gros “nightcrawlers” un peu répugnants et….pas une touche . Et nous, pour le faire chier un peu, par vantardise beaucoup, poussons des ” Yeahhhh !!” des ” Good job !” des “Gorgeous fish !”  des ” Yesssss !” et nous allons même jusqu’à lui chiper des poissons presque à coté de son bouchon immobile. La tête du gars s’enfonce lentement dans ses épaules et son fils le regarde. Au bout d’un quart d’heure de ce suplice, le type remballe ses affaires, prend son fils par la main et disparaît dans les fourrés.

Avec le recul, il me semble bien que le Marc et moi, ce jour là , étions deux beaux enculés.

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