(Read in English) Ce matin, ma rivière était belle comme une jeune mariée dont j’étais une fois de plus le soupirant. Je sais bien que marcher dans l’eau fera fuir à coup sûr les poissons mais je m’en fiche, j’adore ça . Et puis, vers midi, je déniche un petit banc de sable sur lequel je décide de m’arrêter, d’ouvrir ma besace et de calmer ma faim.

Ah ! Les sandwiches au pâté que ma femme avait fait ! Le morceau de baguette coupé en biais comme le veut la tradition, les cornichons, et trois feuilles de salade, la petite bouteille de rosé de Provence aigrelet mais qui descend si bien avec le morceau de Comté et la barre de chocolat au lait comme dessert. Ensuite, j’avise un rocher à l’ombre sous un petit arbuste. Mon Dieu que l’endroit semble parfait pour la sieste..
Et là, les yeux mi-clos ne revient en mémoire les textes si éloquents que l’ami Yvan Audouard avaient écrit sur l’art de la sieste. Comment, vous ne connaissez pas Yvan Audouard ?Ah comme je vous envie mes amis. Yvan était un grand et bel écrivain. Un vrai provençal. Un amoureux de son pays. Tellement amoureux que la Provence se faisait belle rien que pour lui plaire. Il en aimait tous les recoins, toutes les histoires, tous les habitants et leurs traditions. La sieste et son art, il en avait décrit les moindres détails ( L’heure d’été. Ed. Stock). Comment faire pour bien la réussir ? Comme pour un aïoli. On ne fait pas ça n’importe comment ! Malheureux ! Il y a des règles à suivre, des limites à ne pas dépasser sous peine d’outrage- ès sieste. Le dieu Yvan vous surveille. Écoutez le : « L’extinction des lumières, tant intérieures qu’extérieures ne doit pas être absolues. Ce n’est ni un couvre-feu ni un exil. On ne fait que prendre ses distances avec soi-même et son environnement. Nous ne cherchons pas à nous engloutir en nos profondeurs. Simplement nous y plonger et en ressortir tout neuf comme un baigneur de la grottes de Lourdes. Mais dans la sieste le miracle est garanti.

Mon oncle Aristide, quand il quittait la compagnie pour son “péniqué” quotidien avait coutume de dire : je vais m’amortir un moment.”

Et il ajoute : Je ne demande pas vraiment qu’on me considère comme un bienfaiteur de l’humanité mais j’ai en ce domaine (la sieste) une expérience si étendue et si variée que je crois en décrivant les pages qui vont suivre, apporter une contribution qui n’est pas négligeable à l’amélioration de la race humaine.

Il disait également : En Provence, le soleil se lève deux fois, le matin et après la sieste.
Notre maître Yvan Audouard fait aujourd’hui sa sieste éternelle dans les jardins du paradis. Silence ! Faut pas le déranger..

This morning my river was beautiful like a young bride and I was, yet again, the suitor. Of course I know that walking in the river scares the fish, but I don’t care, I love being in the water. Around noon I hunt down a little sandbank; I stop, open my lunch box and appease my mounting hunger. Ah! My wife has prepared little sandwiches of pate’; the baguette cut on the angle, (as it should be) a few small pickles, three leaves of lettuce and a little bottle of rose’ de Provence which is a little sharp but it goes down well with the piece of Comte’; for dessert a bar of milk chocolate. Afterword, I spy a broad rock in the shade of a little shrub. My God, the perfect spot for a nap…

There, with my eyes half-closed something comes back to me; the eloquent words that our friend Yvan Audouard wrote about the “art of the siesta”. What, you don’t know Yvan Audouard?

Oh, how I envy you my friends. Yvan was wonderful and great writer. A real provencal; so in love was he that the Provence was beautiful just to please him. He loved every nook and corner, all the stories, all the people and all their traditions. He wrote about the siesta, the “art” of the siesta in the smallest detail (“L’heure d’ete”. Edition “Stock”). He wrote how to do it with great success. Like for an Aioli. You don’t do that any old way! Don’t be pathetic; there are rules to follow, limits you must not exceed or you shall affront the siesta principle.  The God Yvan is watching you: “Extinction of light, interior or exterior, should not be absolute. It is neither a black-out nor an exile. We only take a little distance from the environment and ourselves. We don’t want to drown in our depths; we simply dive in and emerge restored, like swimming in the grottos of Lourdes. Except, in the siesta the miracle is guaranteed.”

“My uncle Aristide, when he left for his “penique” quotidian (a nap in Provencal) usually said: I’m going to take the edge off.”

And Audouard added: “I don’t really ask that one considers me as a benefactor of humanity, but in this domain (the nap) I have an experience so extensive and so varied that I think what I’ve described in the following pages shall contribute, not negligibly, to the advancement of the human race.”

He also said: “In Provence, the sun rises two times: in the morning and after the siesta.”

Today, our master Yvan Audouard, takes his eternal siesta in the gardens of paradise. Silence! Let’s not disturb him.