Chers Mouchings, comme vous avez été sages tout au long de l’année, oncle Flèche vous raconte une belle histoire de Noël pour vous distraire  et vous faire rêver !

Ce matin, lorsque j’enfourchais mon vélo vers 7 h 30 pour me rendre comme tous les Vendredi matin à l’usine ACME à Brooklyn il faisait si froid qu’il était impossible de changer de vitesse sur la saloperie de dérailleur de cette foutue bécane.
Arriver à grimper la côte de la 14ème rue ressemblait à un supplice chinois.
Lorsque, à bout de souffle j’arrivais devant la porte de cette usine grande comme la Gare du Nord, et que je pénétrais dans l’antichambre de l’énorme pièce où les fameux poissons fumés se vendaient uniquement le Vendredi matin, aux zigotos dans mon genre, j’ai bien cru que j’allais tourner de l’œil.
D’habitude, à cette heure matinale il y a une queue d’une dizaine de clients tout au plus.FISH FRIDAY
Aujourd’hui, veille de Noël et de toutes ces festivités, plus d’une centaine de clients étaient rangés dans ce hall sinistre, couleur gris sale.
Bon, pensais je… je ne vais quand même pas poireauter deux heures au minimum avant de pouvoir acheter du saumon fumé pour faire plaisir à Nancy et Dénis pour l’apéro de ce soir ! Aller… je retourne à la maison illico presto, me réchauffer au lit, tout collé à ma chaude Puanani d’amour.image-asset
Et puis, rapidement, je laissais tomber cette idée de faignasse égoïste.
Pourquoi me demandez vous ?
Et bien, juste un pressentiment…une drôle de sensation que ce serait une idée à la con de fuite au lieu de rester là à me les geler avec tous ces gens..
Pour commencer, devant moi se tenaient trois bonnes femmes, une âgée à la grosse tignasse blanche, une autre avec un anneau doré dans la narine et la troisième faisant voir sur son téléphone portable des photos de ses marmots. Et toutes les trois se fendaient la poire, se faisaient des câlins et se partageaient une énorme tarte aux myrtilles.
Tableau qui, en d’autres lieux et occasions aurait pu être d’un mortel ennui, mais, à ce moment devenait drôle, tendre et réchauffait doucement mon cœur juste échappé du congélateur de la 14ème rue.
Et me voilà, le sourire aux lèvres, surpris en train d’observer et espionner tout ces gens qui faisaient la queue et qu’il y avait dans leurs comportements comme une sorte de douceur, de patience et de joie de se retrouver ensemble dans ce curieux endroit.
Impossible, en France, pensais je !
Faut dire que ce Vendredi là, tous ces braves gens venaient acheter de quoi remplir leurs frigos de saumons et autres poissons fumés les plus délicieux à des prix imbattables afin de fêter le mieux possible les fêtes de fin d’année avec leur famille, amis, voisins etc.. et que rien que les parfums de ces délices à venir vous remplissaient la gorge d’une salive bienfaisante.
Ajoutez à ça la venue d une jeune fille portant un énorme plateau couvert de tranches de saumon fumé qu’elle nous offrait pour nous faire patienter…
Au bout d’une bonne heure et demie, ce fût mon tour d’être servi.
– Et vous désirez aujourd’hui ? Me demanda une jeune serveuse d’origine Polonaise que j’avais entre aperçu la semaine dernière recevant ses premières leçons de vendeuse de poissons fumés.
– Et bien, j’aimerais une livre de ces tranches fines de Coho saumon, une demie livre de ces épaisses tranches de saumon “ citron et poivre “ et une autre livre de “ Royal cut “.
Le temps qu’elle me prépare tout ça une sublime vendeuse, j’ai nommé la belle et délicieuse Monica, la seule vendeuse d’origine hispanique.
Monica a toujours un large sourire lorsqu’elle m’aperçoit.Monica
Hey, Flechy baby. How are you today ?
– Super, Monica. Et toi ?
– En pleine forme, mon amie !
– Dis moi, Monica… comment fais tu pour emballer ces tranches de saumon avec une telle dextérité et vitesse. C’est incroyable  (mais vrai) ?
– Et bien, ça fait vingt ans que je travaille à ACME. On prend des habitudes…
– Tu devrais surtout prendre des vacances, mon amie. Pourquoi ne viendrais tu pas passer quelques temps chez nous en France ?
– J’ai une fille en Italie. Une ville qui s’appelle…je ne me souviens plus très bien…ça commence par un C je crois…
– Florence ?
– Oui, c’est ça, il me semble…
– Bon, Monica…Faut que je me casse. J’ai des amis qui arrivent pour déguster ce sublime saumon.
– A Vendredi prochain, Flechy baby.
– Bye , Monica.
Et, en sortant avec mon chargement de saumon, j’avise sur un mur une affiche sur laquelle est écrit « Happy Christmas and Happy Hanukkah” et, en plus petit “ We love you.”
Happy ? Tu parles Charles. Et pas qu’un peu, mon neveux !