La première fois que j’entendis parler des types de Trout Unlimited remonte aux années 80. J’habitais à l’époque une église désaffectée dans les Catskills Mountains à 3 heures de route de New York City, des montagnes bénies des Dieux qui avaient eu la bonne idée de couvrir ce territoire de rivières aux eaux glacées, pleines de truites magnifiques.  » Flèche, darling« , m’avait déclaré une bonne copine qui bossait dans l’écologie et qui portait le nom prédestiné de Beth Waterman, « tu devrais rejoindre ce groupe de zigotos. Ils font un boulot formidable pour que tu puisses (et tes enfants, si tu t’y met enfin !) continuer à faire mumuse avec ces rainbows de L’Esopus River« .
Le Samedi suivant, je participai timidement à la première réunion de ce « Chapter de trout unlimited  » ( truites sans limites..un nom à faire bander André Breton en personne ). La salle du bistrot de Boiceville était pleine à craquer de ces mecs de tous âges et toutes origines. Des types plein de pèse côtoyant des red-necks locaux, des lycéens boutonneux et des vieilles mains, tous convaincus que si les salmonidés venaient à disparaître, c’est toute la nature et nous avec, bien sûr qui crèveront. L’ordre du jour était le construction de rampes d’accès à la rivière afin de permettre aux handicapés de pouvoir continuer à tremper leurs fils dans l’eau. Moi, à l’époque je trouvais ça un tantinet baroque, mais, discipline oblige, je n’étais pas le dernier à la tache et, des putains de brouettes, j’en ai porté à me briser les reins. Ce n’est que quelques semaines plus tard, lorsque les premiers gars en fauteuils à roulettes se pressèrent sur ces rampes pour prendre leurs pieds (O.K..je sais !) que je compris que ces mecs de Trout Unlimited méritaient également le nom d’  » Angels unlimited « . Voir les tronches de ces vieux impotents grimaçants de bonheur en ferrant les arc en ciel de l’Esopus…putain, si ça vous arrachait pas des larmes c’est que vous aviez une saloperie de coeur en parpaing ! C’était beau comme la Sainte Vierge en plâtre avec des dorures et du bleu et des ampoules qui s’allument et qui s’éteignent, qu’on se dit que tant qu’il y aura des fous furieux comme « Trout Unlimited », la planète aura encore une chance.

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