Un retour dans le Montana, quoi de mieux ? Il me tardait après quelques escapades dans le Sud de retourner dans cet état que j’aime tant, auprès des rivières (Yellowstone, Missouri..et la Madison). Et la bonne surprise : je me suis retrouvée en très bonne compagnie.

Parfois, je ne lis pas toute la quatrième de couverture et ce fut le cas ici. En y retournant et en lisant les paroles de Craig Johnson (le papa de Longmire, le shérif voisin du Wyoming), j’ai eu confirmation de mes doutes.  Des doutes positifs, ne vous inquiétez pas. Mais revenons pour le moment à l’histoire.

meurtres sur la madisonLors de sa virée quotidienne à la Madison River, Rainbow Sam, un pêcheur à la mouche local, fait une triste découverte : le corps d’un jeune noyé. Il prévient immédiatement la shérif Martha Ettinger, et son adjoint Walt. Martha est intriguée par une mouche Royal Wulff plantée dans la lèvre du décédé et ses instincts sont bons : la victime est morte noyée dans un autre lieu puis amenée ici pour faire croire à une partie de pêche qui vire au drame. En retournant sur les lieux du drame, Martha croise la route de Sean Stranahan, fan de pêche à la mouche, peintre et ex-enquêteur du côté de Boston dans une autre vie. Sean a vécu une séparation douloureuse et a décidé un jour de tout lâcher pour venir s’installer dans le Montana où il commence à vendre ses toiles. Troublé par une chanteuse originaire du Sud, Velvet Lafayette, il accepte de l’aider lorsqu’elle lui demande de retrouver les truites que son père a pêchées l’année passée avant de décéder subitement. Il les marquait avant de les remettre à l’eau. La mission étant pratiquement impossible, Sean résiste puis finit par accepter en sentant que la jeune femme lui cache la vérité. Et celle-ci finit par percer lorsque la victime a enfin nom : il s’agit de J.J Bourdreaux, le frère de Velvet. Celui-ci travaillait dans un élevage de truites à quelques kilomètres.

Lorsque Sean vient au secours de Rainbow Sam, à son tour visé par le meurtrier, Sean se retrouve mêlé à cette enquête malgré lui et désigné consultant par Martha. Ensemble, ils vont remonter une piste qui trouve ses origines dans l’un des plus gros business du Montana : la pêche à la mouche.

J’ai passé un excellent moment en compagnie de Sean, Martha et ses acolytes.  Keith McCafferty, rédacteur en chef d’un magazine connu outre-Atlantique (consacré à la pêche, la chasse et la vie au grand air) sait parfaitement traduire la passion de ces hommes pour la pêche à la mouche (et accessoirement la chasse). Les passages entiers consacrés aux sorties à la pêche sont sans doute les plus travaillés, les nombreux termes techniques pourraient quelque peu rebuter les non amateurs mais la transcription de la communion avec la nature, la Madison, le Montana, l’état du « Big Sky » (grand ciel) sont parfaitement maîtrisées.  L’autre point fort, selon moi, c’est la transcription des rapports entre les vrais locaux (chez qui j’ai vécu) et tous ces gens fortunés venus acheter des chalets pour venir profiter du grand air (la faute à Robert Redford en partie avec Et au milieu coule une rivière…). Le Montana, un état très rural, où le bétail surpasse le nombre d’habitants a vu, comme le Wyoming, ses terres rachetées par des millionaires californiens dans les années 90.

Les personnages sont attachants, Martha est amusante, troublée par le beau Sean et celui-ci toujours un peu paumé. J’ai adoré les personnages secondaires et on ne s’ennuie pas une seconde. J’ai évidemment aimé la présence de Harold Little Feather, un pisteur qui vient seconder l’équipe.

« Vous commencez à vous agiter, dit Little Feather. Vous vous dîtes, c’est un Indien. Il fonctionne à l’heure indienne, alors je vais me contenter de hausser les épaules. Mais laissez-moi vous posez une question, quand vous pistez un cerf, quelle est la qualité la plus importante ? »

McCafferty décrit bien l’esprit des gens du Montana et j’ai vraiment eu le sentiment d’être de retour là-bas. Les noms m’étaient familiers, aussi mon avis est forcément un peu biaisé !  Vous ne m’en tiendrez pas rigueur. Mon seul doute vient donc de la sensation de lire le début d’une série… Pourtant, je vous rassure : l’histoire a bien une fin et l’enquête résolue. Mais c’était le temps que l’auteur consacrait à ses présenter ses personnages, surtout les personnages de Sean et celui de Martha, narrateurs de cette enquête. Et j’ai eu la réponse à ma question en lisant, enfin, la quatrième de couverture et les paroles de Craig Johnson : « le début d’une nouvelle série merveilleusement divertissante« .

McCafferty remercie entre autres ses parents dont son père avec ces mots touchants : « Mon père, Keith McCafferty, m’a dit un jour qu’il ferait n’importe quoi pour moi, à condition que je fuie les villes aux aciéries polluées et les vallées appalachiennes ruinées de mon enfance, où le ciel était toujours obscurci par la brume et où les truites se retrouvaient toujours en l’air dans les cours d’eaux rougis par les résidus miniers ».

Merci aux éditions Gallmeister d’avoir choisi de traduire les aventures de Sean Stranahan !

PS : car pour tout dire, j’avais repéré l’an dernier cette série, mais dans sa version originale et j’en avais parlé au rédacteur en chef du Mouching 😉

Editions Gallmeister, coll. Americana, The Royal Wulff Murders, trad. J. Louins-de-Laurens, 379 pages