Jacky et Patrick dormaient l’un contre l’autre à l’arrière, Gonzalo avait commencé à m’expliquer les aventures de Butch Cassidy et le Kid, sa voix me berçait. De la radio sortait Blues March d’Art Blakey, nous filions vers les montagnes. Nous sommes arrivés à notre campement, de modestes cabanes avec une vue imprenable sur le lac. LE lac, celui où chaque année nous attrapons celles que nous appelons aujourd’hui « les truites crocodiles » et qui à elles seules valent le voyage dans ce bout perdu de la Patagonie. Nous avons contourné le lac, l’eau était plus haute que d’habitude, le vent soufflait à fortes rafales, arrivant directement du Chili et des froides montagnes. J’avais repéré un moucvement tout à l’heure, là, juste à l’arrivée de ce courant, dans les herbes, juste à la jonction avec le canal. Cela semblait irréel, le vent était trop fort, le froid empêchait toutes éclosions. Nous étions fourbus. Et puis, par magie, le vent s’est calmé, un sedge, puis un autre. Là, au même endroit elle est montée. Je l’ai vue, noire, énorme. délicate et puissante. J’ai lancé au même endroit où l’eau était sombre, le soleil se couchait dans mon dos, je n’ai vu que ma  mouche disparaitre, par reflexe j’ai ferré. Elle est énorme. Gonzalo n’en revient pas. Elle commence à prendre de la soie et filer vers le courant, elle saute, dans ma tête, Art Blakey tape comme un fou sur les caisses, Lee Moragn souffle comme un diable, la truite semble danser au rythme de Blues March. Finalement elle viendra chercher refuge dans mes pieds, là , près des joncs. Elle est magnifique, Gonzalo le mètre à la main exalte, « 70 centimétros, Cirilo »! Le vent s’est remis à soufflé.

Le soir, dans la cabane, nous étions heureux, notre bonheur était sans limites. De vraies discutions de pêcheurs entre les verres de vin Argentin, les cigares cubains, la viande de Gaillardo et toujours Art Blakey qui battait la mesure !  Le plus beau des voyages. [youtube=hhttp://youtu.be/II7k4imlGcY]