Nous savons bien que les gitans, romanichels, roms, tous ces gens du voyage ont mauvaise réputation. Ils volent nos poules, violent nos grands-mères qui n’y croyaient plus,  jettent des papiers gras sur l’asphalte de nos villes alors que nous sommes les seuls à en avoir le droit, lavent nos parts brise d’ automobile sans être syndiqués et inventent des mouches pour la pêche d’une simplicité et efficacité redoutable sans en tirer un seul centime de bénéfice, ce qui, vous l’avouerez, est une honte !

Avez-vous déjà essayé cette « Peute », inventée par des gitans, chère au justement légendaire M. Bresson ?. Je suis bien certain que, comme moi, cette mochetée de mouche qui ne ressemble à rien est celle que vous emmeneriez sur la fameuse « île déserte ».

Les truites feraient même le voyage avec vous tellement cette affreuse chose est sexy et irrésistible pour eux. Un vrai aimant à poissons avec son hackle en plume de flanc de canard…

Il faut être un sacrément bon pêcheur pour bricoler un truc pareil !

Je dois vous avouer pourquoi je suis en train d’écrire ce machin. C’est parce que hier soir, j’ai visionné un petit documentaire sur Django Reinhardt et que le Django, chaque fois que j’entends ses notes magiques, je me retrouve, encore enfant, devant le petit bistrot des puces de la porte de Clignancourt où sévissaient tous les week-ends des manouches amoureux fous de leurs guitares.

À l’époque, je n’avais aucune idée de ce que le jazz pouvait être mais, cette musique de bistrot était certainement la plus belle chose qui m’a été donnée de vivre, le plus émouvant langage  du monde. J’essayais vainement de comprendre comment ces deux types basanés pouvaient faire courir leurs doigts à une telle vitesse sur le manche . Ca tient toujours, même aujourd’hui,  du mystère, de la magie pure qu’il est vain et idiot d’essayer de comprendre.

Et puis hier soir, ce petit film sur Django, sa passion de la pêche, du billard, de la pétanque, du jeu de cartes, sans jamais oublier qu’avant tout, la musique était sa seule vraie fiancée. Et que le grand Duke Ellington l’avait bien compris, lui qui l’invita à « tourner » en Amérique avec lui. En passant, le Duke, dit-on, au bout d’un certain temps, a du se débarrasser du manouche génial. Pourquoi donc, me demanderez-vous ?

Eh bien, la réponse est bien simple. Django était si passionné de jeux de cartes qu’il lui arrivait fréquemment d’oublier qu’il avait un concert a honorer ce soir-là et restait scotché autour de la table de jeu pendant que les musiciens de Duke  l’attendait sur scène.

Tiens, vous en voulez une tranche, écoutez donc ce morceau qui s’appelle « La pêche à la mouche » (comme par hasard).

Et si notre  » Marseillaise » vous laisse de marbre, écoutez donc la version que Django et Stephane Grappelli, son comparse violoniste en ont fait en 1945. Une merveille !!

Si vous n’êtes pas en train de chialer de bonheur après ça, c’est que vous avez à coeur en fils de fer barbelé.